Le forum social de Davos s’est déroulé cet hiver en pleine crise des « gilets jaunes » en France. Le face à face entre deux mondes que tout oppose, n’est pas prêt de s’arrêter. Il est vrai que les intérêts des uns et des autres sont totalement divergents.
Cette actualité a permis de découvrir à travers deux rapports (l’ONG OXFAM et Attac) le creusement des inégalités dans le monde.
Les inégalités ne sont pas une fatalité, mais le résultat de choix politiques. Cette situation résulte directement de l’aggravation de ces mêmes inégalités et de l’accaparement des richesses par une minorité. Le rapport sur les inégalités mondiales 2018 a révélé qu’entre 1980 et 2016, les 1% des personnes les plus riches du monde ont capté 27% de la croissance du revenu, contre 12% pour les plus pauvres de la planète.
L’éradication de la pauvreté est indiscutablement indissociable de la lutte contre les inégalités. Le coût humain de ces inégalités est dévastateur. Aujourd’hui :
• 262 millions d’enfants ne pourront pas aller à l’école.
• Près de 10.000 personnes décèderont par manque d’accès aux soins de santé.
Voilà 10 ans que la crise financière a frappé laissant d’énormes souffrances sur son passage. Sur cette période, la fortune des plus riches n’a cessé de croître :
• Depuis la crise financière, le nombre de milliardaires a presque doublé passant de 1.125 en 2008 à 2.208 en 2018.
• La fortune des milliardaires dans le monde a augmenté de 900 milliards de dollars rien que l’an dernier soit 2,5 milliards par jour. Sur la même période, la richesse de la moitié la plus pauvre de la population (soit 3,8 milliards de personnes) a chuté de 11%.
• Les milliardaires sont plus riches que jamais. Entre 2017 et 2018, on dénombrait un nouveau milliardaire tous les deux jours.
• Les richesses sont plus concentrées que jamais : l’année dernière, seulement 26 personnes possédaient autant que la moitié la moins bien lotie de la population mondiale (soit 3,8 milliards de personnes contre 43 personnes l’année précédente).
• Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde et propriétaire d’Amazon, a vu sa fortune atteindre 112 milliards de dollars. 1% seulement de sa fortune équivaut au budget total de la santé de l’Ethiopie, un pays de 105 millions d’habitants.
En plus d’accumuler des sommes vertigineuses, les plus riches bénéficient également des taux d’imposition les plus bas de ces dernières décennies, à l’instar des entreprises qu’ils dirigent :
• Dans les pays riches, le taux supérieur moyen d’impôt sur le revenu des particuliers a chuté, passant de 62% en 1970 à 38% en 2013.
• Dans les pays en développement, le taux supérieur moyen d’impôt sur le revenu des particuliers est de 28%.
• Dans certains pays comme le Brésil ou le Royaume-Uni, les 10% les plus pauvres s’acquittent d’une imposition sur le revenu proportionnellement plus élevée que les 10% les plus riches.
• Les super-riches dissimulent 7.600 milliards de dollars aux autorités fiscales. Les multinationales dissimulent également des sommes considérables dans des structures offshore. Ces pratiques privent les pays en développement de 170 milliards de dollars chaque année.
Nous pouvons choisir de continuer à récompenser les personnes qui sont déjà riches, ou au contraire de lutter contre les inégalités et de mettre un terme à la pauvreté. Nous pouvons aussi choisir de bâtir une économie humaine dans laquelle les entreprises et les personnes les plus riches paient leur juste part d’impôts et d’utiliser ces précieuses ressources pour financer les services publics et la protection sociale pour toutes et tous.
Les entreprises multinationales françaises n’échappent à ce phénomène, et elles profitent d’un climat aujourd’hui favorable pour étendre leurs sphères d’influence et solidifier les pouvoirs acquis au cours des décennies passées.
Les grandes entreprises du CAC 40 dégagent des profits records estimés à 90 milliards d’euros en 2017 : ce qui fait de 2017 leur deuxième meilleur exercice des douze dernières années, après le record de 96 milliards d’euros atteint en 2007, intervenu juste avant la crise de 2008. Le CAC 40 entend d’ailleurs battre ce record en 2018.
En un an, les profits ont bondi de 21,3% et même de 78% par rapport à 2015.
Pris globalement, ce sont plus de 60% des profits des entreprises du CAC 40 qui sont versés aux actionnaires sous forme de dividendes ou de rachat d’action.
Selon les derniers chiffres publiés, ce montant a atteint, en 2018, le record de 57,4 milliards d’euros.
Si la rémunération des actionnaires des entreprises du CAC 40 n’atteignent pas encore les niveaux de certaines multinationales anglo-saxonnes, elle est très largement à la hausse, conduisant à terme à une déformation majeure du partage de la valeur ajoutée.
Quant à l’état français, supposé être le gardien général, il ne cherche pas à réguler ces entreprises : les entreprises dont il est actionnaire comme Engie, ont une politique de distribution de dividendes particulièrement généreuse. Cette politique nuit à l’investissement et au final à l’avenir des entreprises.
Le salaire moyen d’un patron du CAC 40 était de 4,68 millions d’euros en 2017. En moyenne, les PDG du CAC 40 gagnent 257 fois le SMIC par an et 119 fois plus que la moyenne de la rémunération de leurs salariés.
Les entreprises du CAC 40 sont loin d’être des modèles en matière d’égalité de rémunération entre leur personnel masculin et féminin, sujet sur lequel elles rechignent à communiquer. Les données disponibles montrent que, sur l’ensemble de ces grandes entreprises, l’écart de salaire moyen, à qualification égale, est de 18,6% au détriment des femmes. Par ailleurs, sur un échantillon d’une soixante de grandes entreprises liées au CAC 40, 13 n’ont aucune femme au sein de leur direction. Sur les 57 PDG, directeurs généraux et président du conseil d‘administration qui dirigent les géants du CAC, il n’y a que deux femmes.
Ces mêmes entreprises sont les championnes de l’évitement fiscal, ce qui leur permet de payer moins d’impôts que les autres entreprises : selon la direction du trésor, le taux d’imposition effectif brut des grandes entreprises était en 2014 de 26 %, contre 32 % pour les PME.
Cette inégalité est possible grâce à des techniques de plus en plus complexes qui utilisent notamment la concurrence fiscale entre Etats.
Cet évitement fiscal est grandement facilité pour les grandes entreprises par le biais notamment du Crédit d’impôt recherche (CIR).
La présence de l’Etat français dans le capital des entreprises n’a malheureusement pas d’effet sur leur comportement. Non seulement les entreprises dont l’état est actionnaire donnent la priorité au versement de dividendes, mais elles sont également parmi les plus actives en matière d’évitement fiscal.
Ainsi Engie, dont l’état est actionnaire à hauteur de 24 %, possède 2.300 filiales, dont 327 sont basées dans des paradis fiscaux : 133 aux Pays-Bas, 74 en Belgique et 28 au Luxembourg, où 27 milliards d’actifs ont été transférés et où Engie a même installé sa maison mère.
Outre Engie, la Belgique attire entre autres EDF et Orange.
T.LADEUX

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